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Evolution des coûts et financement de l’assurance-maladie

Depuis les années 1960, la question liée aux coûts est au centre des débats en matière de politique de la santé. D’une part, on se plaint de l’« explosion des coûts » qui ne semble pas près de s’arrêter et, d’autre part, on discute de réformes concernant le financement du système de santé publique.

La loi sur l’assurance en cas de maladie et d’accidents adoptée en 1912 laissait aux cantons le soin de décider s’ils voulaient introduire l’adhésion obligatoire à l’assurance-maladie et bénéficier ainsi de subventions fédérales. Par la suite, l’assurance-maladie et son financement ont évolué différemment selon le canton. Une situation qui, pour l’essentiel, perdurera jusqu’à la révision totale de la loi sur l’assurance-maladie de 1994 et qui formera la toile de fond des débats relatifs au financement et à l’évolution des coûts concernant l’assurance-maladie.

Le phénomène de l’« explosion des coûts »

L’expression « explosion des coûts » est apparue dans les années 1960 en rapport avec le système de santé. Au début, elle faisait référence au fait que les coûts de la santé progressaient plus rapidement que la croissance économique, et ce depuis les années 1950, peut-être même avant. Or, voici tout le paradoxe : on parle d’« explosion », alors qu’il s’agit d’une évolution qui s’est installée petit à petit et qui dure depuis plusieurs décennies. La part du secteur de la santé dans le PIB est passée de 5 % vers 1960 à 7 % dans les années 1980, puis à 10 % vers l’an 2000. Depuis lors, elle oscille entre 10 % et 11 %.

Ce phénomène d’« explosion des coûts » reposait sur une évolution qui a longtemps été souhaitée au niveau politique et qui faisait l’unanimité sur le plan social. Durant les années de boom économique qui ont suivi la Deuxième Guerre mondiale, la Suisse a connu un système de santé plus onéreux. Le facteur déterminant était la contribution des cantons. Depuis les années 1950, ils ont investi davantage dans le système de santé en développant considérablement l’infrastructure hospitalière et l’offre en prestations médicales. De plus, la demande en assurance-maladie a fortement augmenté, en partie à l’initiative des cantons et des villes, qui ont progressivement consolidé la couverture d’assurance et la portée de l’assurance-maladie obligatoire. Entre 1945 et 1965, le nombre des personnes assurées a ainsi doublé. Le taux d’assurance est passé de près de 50 % de la population vers 1945 à plus de 80 % au milieu des années 1960 (G12). Même sans un système obligatoire étendu à toute la Suisse, l’assurance-maladie couvrait, dès 1980, pratiquement l’ensemble de la population.

Le financement du système de santé à partir des années 1960

Dans l’immédiat après-guerre, la situation financière des caisses-maladie était souvent précaire. Une part croissante des activités concernait le marché réglementé de l’assurance-maladie obligatoire. Finalement, les autorités ont statué sur l’étendue de la couverture d’assurance et sur un plafonnement des primes d’assurance acceptable sur le plan de la politique sociale. Elles ne pouvaient répercuter que de manière limitée l’augmentation des coûts sur les primes. Dans l’entre-deux-guerres déjà, de nombreuses caisses étaient déficitaires du fait de la crise économique. Pour des raisons structurelles (manque de réformes et stagnation des subventions fédérales à l’assurance-maladie), la situation financière des caisses-maladie n’a fondamentalement pas changé par la suite.

Dans ce contexte, les caisses-maladie ont réclamé, dès l’entre-deux-guerres, une augmentation considérable des subventions fédérales. La révision partielle de la loi sur l’assurance-maladie de 1964 en a tenu compte. La principale nouveauté consistait en une augmentation importante des subventions versées aux caisses-maladie. Celles-ci ont été liées à l’évolution des dépenses des caisses-maladie afin de stabiliser, sur le long terme, leurs résultats financiers. L’objectif était que la Confédération couvre au maximum à hauteur de 30 % les dépenses des caisses. Après 1964, le financement de l’assurance-maladie a pris une nouvelle orientation. Les subventions de la Confédération ont augmenté progressivement (de 312 % entre 1966 et 1976, soit de 193 à 795 millions de francs), alors que la part que représente la contribution des assurés (sous la forme de primes d’assurance) a légèrement reculé (passant de 68,3 % à 67 % entre 1966 et 1976).

Toutefois, cette situation n’a pas perduré. Lorsque, au milieu des années 1970, l’économie est entrée en récession et que les rentrées fiscales ont diminué, le Conseil fédéral a pris des mesures d’urgence afin de limiter les charges de la caisse fédérale liées au subventionnement de l’assurance-maladie. En 1975 et en 1976, les subventions fédérales ont été réduites de manière linéaire de 10 %. Entre 1975 et 1981, la part représentée par les subsides de l’Etat par rapport aux recettes des caisses-maladie a baissé de 16,6 % à 14,4 %. En contrepartie, les assurés ont de nouveau dû passer à la caisse : afin de compenser la diminution des contributions fédérales, la « franchise », à savoir la participation minimale des patients eux-mêmes, est passée de 20 à 30 francs. Entre 1975 et 1981, la participation des assurés a ainsi augmenté de 5,7 % à 6,7 %.

Si l’on analyse la répartition générale des coûts en matière de santé entre l’Etat, les assurances et les ménages entre 1980 et 2000, on constate que la participation aux coûts de l’Etat (Confédération, cantons et communes) a reculé de 19 % à 15 % et que celle des assurés prenant eux-mêmes en charge leurs frais a diminué de 39 % à 32 %, tandis que les coûts des assurances (assurances sociales et privées) sont passés de 40 % à 50 %.

Literatur / Bibliographie / Bibliografia / References: Alber Jens, Bernardi-Schenkluhn Brigitte (1992), Westeuropäische Gesundheitssysteme im Vergleich : Bundesrepublik Deutschland, Schweiz, Frankreich, Italien, Grossbritannien, Frankfurt ; Sommer Jürg (1978), Das Ringen um die soziale Sicherheit in der Schweiz. Eine politisch-ökonomische Analyse der Ursprünge, Entwicklungen und Perspektiven sozialer Sicherung im Widerstreit zwischen Gruppeninteressen und volkswirtschaftlicher Tragbarkeit, Diessenhofen ; Bundesamt für Statistik (2003), Gesundheitskosten in der Schweiz. Entwicklung von 1960 bis 2000, Neuchâtel.

(12/2015)